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Chronique : Le Jeu du chat et de la souris

Auteur(s) : Setona Mizushiro.

Kioïshi, jeune trentenaire, est contacté par un détective privé chargé par sa femme d’enquêter sur lui. Cet homme se révèle être Imagasé, un ancien camarade d’étude, qui lui propose un marché incongru : il garde le silence sur les différents adultères de Kioïshi en échange de son corps. Sa surprise passée, le jeune mari volage accepte un baiser afin de protéger son mariage…

Le Jeu du chat et de la souris, publié par les éditions Asuka, est présenté comme un yaoi. Mais au-delà de cela,  Setona Mizushiro l’avoue elle-même, ce qu’elle recherche, « c’est la manière de signifier l’amour difficile, voir impossible entre deux personnes. Depuis le début de ma carrière, j’ai voulu trouver un thème qui symbolise un amour difficile à surmonter. L’amour entre deux hommes en est un parfait exemple. Pour tout vous avouer, j’ai choisi ce thème comme j’aurais pu mettre en avant une grande différence d’âge. » Ce qui malheureusement ne fait pas l’éloge de l’ouverture de la société nippone sur cette question.

Ainsi Kioïshi, lâche et indécis, se retrouve à l’aube de la trentaine à devoir faire des choix : choix de sa sexualité, choix de sa vie. Face à lui, Imagasé semble fort, sûr de lui, voire un peu froid au départ, mais se révèle peut-être être le personnage le plus fragile, souffrant d’un amour presque obsessionnel pour Kioïshi.

Et là est la force du Jeu du chat et de la souris : la confrontation entre ces deux personnages qui vont se fuir, se chercher, se blesser, mais aussi se révéler à eux-mêmes. Kioïshi se retrouve au pied du mur et se doit de choisir entre un couple « conventionnel » conforme à une certaine société et son amour pour Imagasé. Sa lâcheté et son indécision seront présentes jusqu’au bout et seront source de nombreuses souffrances pour Imagasé - jusqu’à la rupture.

En quelques pages, S. Mizushiro aborde ou plutôt effleure quelques sujets « réalistes » pas forcément présents dans les yaoi classiques, tels que l’obsession, le conformisme d’une certaine société (notion de « couple normal ») et l’intolérance, avec les paroles blessantes de Natsuki, femme elle aussi amoureuse de Kioïshi : « s’enfoncer dans la pourriture », ainsi qualifie-t-elle les relations homosexuelles. Eléments souvent complètement inhibés dans le yaoi « classique ». Il en est de même pour les scènes sexuelles qui ne sont pas floutées.

Il n’en reste pas moins qu’avec son graphisme impeccable, l’auteure nous dépeint le début d’une belle histoire d’amour qui aurait pu se révéler naïve et peu originale. Mais elle arrive à décrire l’éveil d’une véritable relation amoureuse, la recherche de soi-même et la découverte de l’autre. Certains passages de conversation entre les deux personnages principaux sont parfois assez pertinents, dans le sens où ils créent un univers complexe où deux personnalités s’opposent, s’acceptent, se cherchent, mais ne s’idéalisent pas, sans chichis ni excès. Et sur un one-shot, on ne peut qu’apprécier ce tour de force.

Au-delà des types de relations amoureuses (hétérosexuelle, homosexuelle), au-delà du type de manga, ce one-shot (qui finalement ne va plus en être un) est un tout petit pan de relation humaine universelle qui peut toucher tout le monde par sa simplicité. Alors bien sûr, les gros clichés sont présents, mais cet album est censé être un yaoi, pas une œuvre d’auteur amenée à nous faire réfléchir ; je dirais donc, peu importe, car chacun prend ce qu’il veut dedans, suivant son vécu, sa personnalité, sa sensibilité. Et puis à la base, c’est pour se détendre et passer un bon moment… ou tout simplement rêver, non ?