NDLR : Comme il vous l’a raconté dans son précédent article, Bernard Joubert a écrit un certain nombre de courtes chroniques pour le magazine français Gay comix, entre 1991 et 1994. Nous vous proposons ici un florilège de cette rubrique intitulée “Panorama de la BD érotique gay”.
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ANARCOMA
Accueilli dans la revue espagnole El Vibora dès son premier numéro, en 1979, Anarcoma est un travesti (selon son auteur, mais plus précisément un transsexuel), enquêtant dans les cabarets gays de Barcelone, dans un monde fait de drogue, de sexe et de violence.
Jamais avare d’obscénité, provocante, se réjouissant du détail qui choque, cette série de Nazario fut un fleuron de la contre-culture espagnole de l’après franquisme, laquelle puisait son inspiration dans l’underground américain. On y partouze vigoureusement et bruyamment (les sodomies font “Squish ! Squish !” et les fellations “Shlurch ! Shlurch !”), en bavant et transpirant, dans les toilettes publiques ou les églises. Le dessin de Nazario est en adéquation avec l’ambivalence de son héroïne, mélangeant ligne épurée et surcharge de détails. Au corps glabre et livide des trans s’oppose celui de machos velus dont on pourrait, avec une loupe, compter les poils.
Autre constante de cet univers fantasmatique qui se soucie peu de vraisemblance : tous les personnages sont des hommes (s’il n’y a pas de queue entre leurs jambes c’est qu’il y a eu opération), pédés, et montés comme des ânes.
En France, les albums d’Anarcoma furent publiés chez Artefact et Magic Strip. Dans le second et dernier, Cultes (traduit en 1991), Nazario donnait libre cours à son goût pour l’imagerie saint-sulpicienne, et certaines pages sont un régal de kitsch et de mauvais goût assumé.
[Article initialement paru dans Gay comix n° 2 (décembre 1991).]
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FABRICE
Paru en 1989 aux éditions Hofmann, cet album unique réserve de bonnes surprises à qui s’aventure à le lire - alors qu’à le feuilleter, son dessin fait de photos décalquées n’est pas engageant. Après une première partie plutôt humoristique où Fabrice, adolescent de 16 ans, découvre que son oncle et sa tante ont des visées sur sa personne, l’histoire devient plus franchement sexuelle lorsqu’il part en vacances au bord de la mer avec Renaud, autre ado déluré.
Profitant de l’absence des parents, les garçons s’adonnent à un jeu de domination qui commence sous la douche et se poursuit sur le lit. Cas rare dans la BD porno, les dialogues sonnent justes et, en peu de pages, on s’étonne de découvrir aux personnages des personnalités assez riches et crédibles. On ne s’y attendait pas. Visiblement, les auteurs, Bob et Malax, ont pris à coeur leur histoire et ne se sont pas contentés d’aligner du cul pour du cul. Mais qui étaient-ils, ces deux-là ? Fabrice semble avoir été leur premier et dernier album.
[Article initialement paru dans Gay comix n° 2 (décembre 1991).]
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LITTLE ANNA MAE IN COMIC LAND
Les dirty comics - également appelés eight pagers - étaient, comme tout bon érotobédéphile le sait, des petits fascicules de bande dessinée pornographique apparus aux Etats-Unis au début des années 30, dessinés et imprimés anonymement, et vendus sous le manteau pour quelques cents. La grande majorité de ces opuscules montraient des célébrités (chanteurs, acteurs) ou des personnages de BD populaires dans des situations sexuelles. Clark Gable s’envoyait en l’air avec Joan Crawford, tandis que Betty Boop s’offrait à tout ce qui passait. Il ne semble pas qu’il y ait eu de dirty comics spécifiquement gays, mais la bisexualité masculine y apparaissait de temps à autre, tout comme c’était le cas dans les films pornos clandestins. Les dirty comics étant essentiellement des parodies, cette bisexualité était source de gags, comme lorsque, dans une partouze, le bon vieux père Illico n’en finissait pas d’enculer le major Hoople, au grand dam de ce dernier.
Dans un savoureux dirty comics de la seconde moitié des années 40, Little Anna Mae in Comic Land, une petite fille, fan de BD, rend visite à ses héros et les découvre moins vertueux qu’elle ne les imaginait. Superman, Bulletman, Captain Marvel et Captain America n’ont qu’une idée en tête : sauter les nanas (Loïs Lane, Mary Marvel, etc.). Désappointée, Anna Mae tourne la page et tombe sur Batman et Robin, le fameux duo dynamique. “Ils sont sûrement en route pour attraper des voleurs !” pense-t-elle. Tu parles ! Sitôt à l’abri des regards, Batman et Robin entrouvrent leurs calebars élastiques pour se sucer à qui mieux mieux. Le Dr Wertham avait raison !
[Article initialement paru dans Gay comix n° 2 (décembre 1991).]
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MACHO
Bande dessinée italienne, dessinée anonymement par Bruno Marraffa, dont quinze épisodes ont été publiés en France par Elvifrance, en seconde moitié du pocket Mat-cho, en 1986 et 1987. Il s’agit d’une curiosité dans le sens où, produite pour un marché hétéro et, de plus, volontiers homophobe, cette série présentait un héros bisexuel ainsi qu’une majorité de scènes érotiques entre mecs (les pockets italiens contenant même une back up story 100 % gay).
Macho, le bien nommé, était un docker hollandais dont les principales occupations se résumaient à virilement partouzer avec ses copains du port d’Amsterdam et se castagner avec les bandes rivales. Il était monté comme un taureau. Cela donnait des séquences de baises très musclées, voire violentes, avec des fist-fuckings (toujours pratiqués dans le cadre d’une vengeance), des injures et du sang. Lorsque Macho rencontrait un copain, il l’enculait. Lorsqu’il rencontrait un ennemi, il l’enculait aussi, mais sans prévenance. Gageons que c’est cette douloureuse absence de lubrifiant qui choqua le sensible Charles Pasqua, ministre de l’Intérieur, lequel décida l’interdiction administrative de ce pocket en décembre 1987. En Italie, il parut vingt numéros du pocket Macho, de 1984 à 1986.
[Article initialement paru dans Gay comix n° 2 (décembre 1991).]
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LA MAISON DANS LES DUNES
La carrière du dessinateur Lucques a été presque entièrement vouée à l’érotisme, mais la Maison dans les dunes est l’unique histoire dans laquelle il ait présenté des relations sexuelles entre hommes. (On avait certes pu relever une petite fellation entre deux mâles dans Clitounet et Clitounette, aux éditions du Cygne, mais il s’agissait de lapins…) Sans cette histoire, l’oeuvre de Lucques aurait été lacunaire. Elle constitue en fait, en dix pages, un chapitre du premier volume de l’Encyclopédie Aphrodisiaque (autoédité par l’auteur en 1982 sous le label Erotic-Bizness, réédité plus tard chez Glénat dans la collection le Marquis), chapitre sobrement titré “l’Homosexualité masculine” et concluant le volume. On y voit un homme qui, fuyant une épouse castratrice, est recueilli par un jeune couple dans sa villa. D’abord séduit par la femme, il tombe bien vite sous le charme de son compagnon, et tout ça se termine par un allègre triolisme bisexuel au bord de la piscine. Le remarquable de l’affaire est que cette courte incursion de Lucques dans le monde de l’homosexualité masculine - qui est, de toute évidence, étrangère à sa libido - aura été tout aussi réussie que ses autres bandes, tout aussi passionnée, poétique et jouissive.
L’auteur fait même précéder son histoire d’une longue recommandation à l’usage des jeunes dessinateurs de BD dans laquelle il précise, entre autres : “L’artiste soucieux de traiter ce sujet peindra les rapports homosexuels sans chercher les ricanements de gêne ou de dégoût que provoque généralement un érotisme qui nous est étranger. Il l’abordera avec la même émotion que celle suscitée par Lesbos, en évitant les clichés du genre “tantouze” ou “grande folle perdue” qui appartiennent à la forme souvent très subtile de répression décrite plus haut.”
[Article initialement paru dans Gay comix n° 2 (décembre 1991).]
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MATELOTS & MATELOTAGES
Surprise : c’est dans les pages a priori hétérosexuelles du magazine Bédé adult’ qu’est paru, autour de son trentième numéro et de 1982, Matelots & matelotages, une histoire de 45 pages, rééditée dix ans plus tard dans Gay comix, où ne sont montrés que des hommes se donnant du plaisir avec d’autres hommes. Commencée par le dessinateur Claude Catta (qui signait Jenn Van Hess de l’érotisme hétéro), l’histoire est terminée anonymement par W.G. Colber qui, venu de la presse pour jeunes, a, à l’époque, déjà mis le doigt dans le cul sous le nom de Trébor (Vihila et Yolanda). Le style de ces deux dessinateurs est suffisamment proche pour que les lecteurs ne les différencient pas, mais ce que remarque l’oeil le moins averti est que, soft dans les premières pages, évitant tout sexe visible, les images s’enhardissent au fil du récit jusqu’à ne plus rien dissimuler des anatomies dans les orgies finales.
Le scénario, pseudo historique, se la joue Oncle Paul : il s’agit, assurent les cartouches de narration, d’enfin révéler ce qu’était la marine à voile au temps des corsaires. Les marins se passionnaient pour les noeuds. Matelots et matelotages ne sera pas repris en album, sauf en Allemagne, chez Kult Editionen, en 1994, sous le titre Die Liebe der matrosen (l’amour des marins).
[Article initialement paru dans Gay comix n° 3 (février 1992).]
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ROLANDO DEL FICO
Cette éphémère série de pockets, parue en Italie au début des années 70, inédite en français, dessinée anonymement par Giuseppe Montanari (auteur de Goldrake), avait pour héros un archétype de la “folle”. Jeune dandy perpétuellement dépassé par les événements, Rolando cherchait à séduire des machos, irréductibles hommes à femmes, et cavalait de placard en balcon pour échapper à leur courroux, ou à leurs épouses nymphomanes. Est-il besoin de préciser que les gags étaient lourds, lourds, lourds ?
Côté pockets transalpins, on trouva des héros efféminés moins caricaturaux dans Sukia (en français dans Électrochoc) et Batty & Gay (en français dans Satires), avec Gary, l’assistant de la vampire Sukia, et Gay, l’ami travesti de la prostituée Batty, de virils actifs dans Macho (en français dans Mat-cho) et Vampira (en français dans BD Climax), et une inhabituelle exploration de l’homosexualité refoulée des lecteurs dans Sbarre, récits indépendants se déroulant dans des prisons, dont parut une cinquantaine de numéros dans les années 80. Les viols entre hommes y étaient très fréquents - disons une scène de sexe sur deux -, et cet aspect rare de la BD porno mériterait une étude particulière.
[Article initialement paru dans Gay comix n° 6 (octobre 1992).]
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MALE INSIDER
Publié de 1989 à 1991, le magazine Male insider avait pour but, comme tant d’autres, de présenter des photos de mecs à poil, mais faisait également place aux bandes dessinées. Certaines n’auraient mérité d’être montrées que dans un fanzine, d’autres étaient d’un niveau pro. Outre des reprises de Vuillemin et König, on pouvait y lire des histoires de Philippe Leconte, Novaro, Mick Angel (des parodies) et Colas Lamb (très fortement inspiré de Vaughn Bode). Douze numéros parurent, avec des BD dans les onze premiers.
Leconte avait avant et pendant cela dessiné pendant des années un strip humoristique en page de sommaire du mensuel Gay infos, chez le même éditeur, dans une veine rarement bienséante, à la Vuillemin, scato, obscène (concours de pets, déboires de pissotières). Hors de la presse spécialisée, sa carrière dans la BD ne prit pas l’homosexualité pour thème (Et Paris chez Futuropolis, Fidèles au poste et les collectifs Frank Margerin présente aux Humanoïdes Associés, un flip book chez Rackham…).
[Article initialement paru dans Gay comix n° 6 (octobre 1992).]
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NINETY-NINE GIRLS
Ce one-shot écrit et dessiné par Terry Laban en 1991 compte parmi les plus amusants comic books publiés par Eros Comix aux Etats-Unis. Sur un mode distancié - l’humour permet des audaces -, l’auteur y dresse un catalogue de (presque) toutes les formes de sexualité (inceste, zoo, pédo, gérontophilie et mille autres badineries inénarrables). L’histoire commence avec quatre valeureux cow-boys réunis, le soir, dans la prairie, autour d’un feu de bois. Pour tromper l’ennui, ils ont recours à un jeu très rigolo, bien connu des boy-scouts et des séminaristes : le concours de branlette. Le perdant, celui qui a joui en dernier, doit, à la façon de Shéhérazade, raconter une histoire ou se laisser baiser par les autres. Une fois de plus, c’est le vieux Cookie qui est forcé de s’y coller. Il râle. Il a épuisé son stock d’histoires, il n’a plus rien à dire. Mais voir ses collègues sortir le pot de vaseline pour lui infliger son gage réactive son inspiration.
Cookie leur conte la vie d’Oom-Chucka Willy, surnommé la plus grosse bite de l’Ouest, qui, à peine né, baisait indifféremment sa mère ou un troupeau de bisons. Son épopée se terminera par une gigantesque partouze de plusieurs milliers de personnes à la suite de laquelle l’âme damnée d’Oom-Chucka Willy ira faire reluire en enfer la triple chatte de madame Satan…
Le récit du vieux Cookie a beaucoup plu à ses camarades. Ceux-ci le récompensent en lui offrant, pour une fois, leurs virils fessiers. “Swing low, sweet charioooot…”
[Article initialement paru dans Gay comix n° 8 (mars 1993).]
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TALK DIRTY
Du cul, du cul et encore du cul… Ainsi peut se résumer Talk Dirty (Sois vicieux, en français, chez Glénat), écrit et dessiné par l’Allemand Matthias Schultheiss au début des années 90. Ce qui n’en fait pas un album stupide. La mise en page est même conceptuelle, les dialogues étant placés en dehors des cases, à droite de la page, dans une colonne réservée à cet effet. L’album se compose de deux parties d’une quarantaine de pages chacune. Dans la première, un homme et une femme passent une nuit à baiser dans la cabine de pilotage d’une grue portuaire. Dans la seconde, le même couple s’envoie de nouveau en l’air, dès le lendemain, dans le même décor, mais cette fois en compagnie d’un troisième personnage, un transsexuel prénommé Orlando.
D’abord dérangé par la présence de ce tiers, l’homme finit par se laisser séduire. Bien que réticent, il se laisse embrasser par Orlando, puis se décide à le sucer et, l’ambiance s’étant échauffée, l’encule et se fait enculer en criant : “Baise-nous bien, sale pute, bourre-nous le cul, gicle. Crache-nous dans la gueule, pisse-nous dessus…” Very dirty, le parlé du monsieur, le titre d’origine ne mentait pas. La nuit se termine dans un délire de fist-fucking, de corps enchevêtrés et de jets d’urine - et tout le monde il est content.
[Article initialement paru dans Gay comix n° 9 (mai 1993).]
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SHE-MALE TROUBLE
Il n’y a pas de doute : le plus obscène des dessinateurs américains se nomme John Howard. Après avoir autopublié des oeuvrettes, le bonhomme commence à véritablement se faire connaître en 1990, avec le lancement d’Horny Biker Slut, chez l’éditeur Last Gasp, un comic book underground particulièrement sale et vulgos, se déroulant dans le milieu des motards. C’est dans le deuxième numéro d’H.B.S., dans un épisode intitulé J’irai cracher sur ta fouine, qu’apparaissent pour la première fois les soeurs Mc Gootch, deux transsexuels aussi méchants que vicieux dont la principale activité consiste à obturer tous les orifices passant près de leurs queues.
Un an plus tard, John Howard en fait les vedettes de She-Male Trouble, un nouveau comic book entièrement consacré aux transsexuels. En plus d’une aventure des Mc Gootch (qui, dans le n°1, se font violer par un inspecteur de police, avant de lui rendre la pareille), on trouve dans She-Male Trouble des portfolios de divers dessinateurs et des bandes de James Burchett qui, toute pornographiques qu’elles soient, contrairement à celles de John Howard, se singularisent par du romantisme et du réalisme. Les transsexuels y sont amoureux, sensibles et préoccupés par leur identité : doivent-ils, oui ou non, se faire opérer et changer de sexe ?
[Article initialement paru dans Gay comix n° 9 (mai 1993).]
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BOB MARONE
En 1983, Yann et Conrad créent le personnage de Bob Marone (et son compagnon Bill Gallantine), parodie de Bob Morane, série littéraire de l’écrivain Henri Vernes. Mais alors que les romans, destinés à un jeune public, faisaient l’impasse sur la vie intime des héros, la BD de Yann et Conrad révèle que Bob et Bill vivent ensemble, couchent ensemble et s’aaaaaiment passionnément. Qui n’a pas vu le gros Bill couvert de bisous par le petit Bob ne sait pas ce qu’est la tendresse.
Pourtant, un jour maudit, forcé par le destin et bien malgré lui, le commandant Marone copule (dans l’obscurité) avec une créature féminine. Bill pourra-t-il lui pardonner cette infidélité ?
Deux albums sont parus aux éditions Glénat : le Dinosaure blanc, à la recherche de Frank Veeres et le Dinosaure blanc, l’affrontement.
[Article initialement paru dans Gay comix n° 11 (octobre 1993).]
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OMAHA
Rob Shaw est un chien. Rien d’étonnant à cela, puisqu’il apparaît dans la série animalière Omaha, réalisée par les Américains Kate Worley et Reed Waller dans les années 80. Chaque personnage de ce soap opera érotique issu de l’underground tardif possède une particularité dans laquelle peut se reconnaître une partie du public : l’un est un peu gros, l’autre handicapé et Rob Shaw est gay.
C’est un des plus sympas : il est l’ami sincère sur qui on peut toujours compter lorsque surviennent les ennuis, il est artiste, photographe de talent, et adore faire la cuisine. Il ne s’est jamais complètement remis de la disparition de son compagnon deux ans auparavant, emporté par un cancer - et non par le sida, parce que “nous autres, pour la plupart, on meurt bêtement comme tout le monde”. Les premiers épisodes d’Omaha ont été traduits en France sous forme de quatre albums, chez Comics USA (Glénat), en 1992 et 1993.
[Article initialement paru dans Gay comix n° 11 (octobre 1993).]
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VAMPIRA
Laid et bossu, violeur et bisexuel, tel fut Figor, le second rôle de la série Vampira, publiée en Italie par les éditions Galax - 21 numéros, de 1980 à 1982 -, un petit éditeur qui se distinguait en pratiquant la surenchère pornographique. Monstrueux, Figor l’était notamment par la taille de son sexe. “La nature a compensé son injustice en me dotant d’une virilité puissante” déclarait-il, son volumineux machin à la main, en un commentaire superfétatoire.
Archétype du serviteur à la Frankenstein, entièrement dévoué à la cause de son maître - en l’occurrence une maîtresse vampire -, Figor pénétrait indifféremment femmes et hommes en grognant : “Rhââ ! Rhââ !”
Quelques épisodes de Vampira furent publiés en France, au début des années 80, par les éditions C.A.P., dans BD Climax et Sexy BD - sans souci de continuité. On regrettera l’absence inexpliquée du troisième épisode italien, lequel se déroulait au “Congrès Homosexuel de Baker street”, la rue de Sherlock Holmes.
[Article initialement paru dans Gay comix n° 11 (octobre 1993).]
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LES CHÉRIES
Premier album d’Hippolyte Romain, publié par les éditions Dominique Leroy en 1984, les Chéries réunissait des gags en une page et des croquis réalisés au Palace durant les après-midi gays (Romain ayant collaboré à la publication Palace magazine). On y trouve caricaturée toute une faune de Parisiens branchés, dragueurs superficiels hantant la terrasse des cafés mondains et les boîtes de nuit. Petites scènes de ménage, bribes de conversation et réflexions désabusées sur le sexe : “Alors, Jean, ça y est, il paraît que tu es fidèle. On t’as vu deux soirs de suite avec le même garçon…”
Ces chéries, Hippolyte Romain les connaît bien puisque son monde est celui de la mode et du Paris by night. Né en 1947, il a d’abord été journaliste avant de s’intéresser au dessin et de publier ses premiers travaux dans Pilote. On l’a vu ensuite dans Gai pied, l’Echo des savanes, Charlie mensuel, Vanity, Vogue…
[Article initialement paru dans Gay comix n° 11 (octobre 1993).]
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PASOLINI : PIG ! PIG ! PIG !
Ecrite par un Belge, Jean Dufaux, illustrée par un Italien, Massimo Rotundo, et publiée par Glénat (un Français) en 1993, cette bande dessinée n’est pas une biographie au sens strict - même si la vie de Pier Paolo Pasolini en est le sujet principal et est maintes fois évoquée par le biais de flash-backs. Il s’agit d’une fiction policière dans laquelle un flic romain, dix ans après l’assassinat du cinéaste poète, décide de rouvrir le dossier et de reprendre l’enquête.
D’abord indifférent à l’oeuvre de Pasolini, ce policier va découvrir la personnalité du réalisateur de Salo et du Décaméron, et en être fasciné. Finissant même par s’identifier totalement à lui, il se mettra à fréquenter les bars gays, couchera avec des hommes, et sera tué, sur une plage d’Ostie, à l’endroit exact où Giuseppe Pelosi, l’assassin de P.P.P., commit son forfait.
Au dessin, Rotundo en fait le minimum (il soignait davantage ses Ex-libris eroticis), mais le scénario de Dufaux se lit sans déplaisir.
[Article initialement paru dans Gay comix n° 13 (mars 1994).]
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LES AMOURS HOMOSEXUELLES DE LOUIS XIII
Deuxième album (après Odeurs de mâles de Frétet) issu du magazine Gay comix, ce récit historique et pornographique est - fait rare en BD - le remake d’une bande réalisée une dizaine d’années plus tôt. La première version, soft, avait été dessinée en 1980 et 1981 par Paco Robledo Britto, sur scénario d’Hubert Mortier, et publiée dans le Caméléon et peut-être d’autres magazines hétéros. Britto était un bâcleur et cette première version ne fut pas reprise en album de librairie. Mais le même scénario fut confié à un meilleur dessinateur, S. Nordahl, déjà auteur des Damnés de Mallande dans Bédé adult’, au style proche de François Bourgeon et de la ligne réaliste claire à la mode chez Glénat, notamment dans la collection “Vécu” (Dermaut, Kraehn…). Il s’agit du récit historique, quasiment didactique, de la vie sentimentale et sexuelle de Louis XIII, roi de France au XVIIe siècle, qui, bien que marié à Anne d’Autriche, s’envoyait les beaux gars de la cour.
Nordahl porte attention aux détails et base sa documentation sur des gravures d’époque. Mais, dans sa structure, ce Louis XIII ne ressemble à aucun autre album de BD puisqu’il alterne en de très courtes séquences des événements historiques connus (couronnements, batailles, etc.) et des cases purement hard. L’ensemble, lié par un texte narratif permanent, a un côté aride et répétitif. Ça en fait aussi le charme car il ressemble ainsi à un manuel scolaire dépravé, et rappellera à certains que, pour passer le temps pendant les cours d’histoire, ils zizifiaient les illustrations de leur Lagarde et Michard.
[Article initialement paru dans Gay comix n° 13 (mars 1994).]
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JULIA O JULIO
Julio est un mignon éphèbe blond, doux et canaille, qui a un faible pour les vieux machos hétéros. Lorsqu’il sort draguer, il se maquille, met une perruque, et se fait appeler Julia. Un photographe tombe amoureux de lui. Un ancien légionnaire paye pour le partouzer en compagnie de deux autres hommes. Et tous se révèlent ravis de découvrir, dans le feu de l’action, que celui qu’ils croyaient être une femme est en réalité un homme du plus virilement outillé.
Travestisme et bisexualité, tels sont les thèmes de cet album sorti dans la “Colección X”, en Espagne, en 1993. On se gardera de confondre Roca, son auteur, avec un autre Roca déjà publié dans cette collection, et qui ne présentait, lui, guère d’intérêt. Le Roca de Julia o Julio, s’il n’est pas inoubliable, a du moins une solide compétence professionnelle. Un trait réaliste et dynamique.
[Article initialement paru dans Gay comix n° 15 (octobre 1994).]
mai 4th, 2011 à 12:15
[…] d’une bande de 1982 parue initialement dans le magazine Bédé adult’ et rééditée dans Gay comix. Il s’agit d’un récit historique où corsaires et flibustiers, quand ils ne s’étripent pas […]